Le journalisme à l’épreuve du Web
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Multimédia, formats gratuits, surabondance de contenus… le Web impose au journalisme de nombreux défis qui révolutionnent ses pratiques
Au début des années 2000, les rédactions des grands groupes de presse prennent le pas d’Internet en proposant sur leurs sites, des articles gratuits. Pour répondre à la demande de plus en plus pressante des lecteurs, cette tactique les conduit pourtant à leur perte: partout dans le monde, les quotidiens sont en crise.
Les revenus des ventes et de la publicité sont en chute libre, le papier ne correspond plus aux usages des consommateurs.
Repenser le journalisme sur le Web
Aujourd’hui, l’information circule sur une multitude de canaux. Rien que sur Internet, les réseaux sociaux, blogs et sites d’actualités se partagent un lectorat volatile. Si le métier a toujours été confronté à l’urgence de publication, il fait face à présent à une nécessaire instantanéité. Bien souvent au détriment de la vérification des sources et du traitement éditorial de l’information.
Ce qui compte c’est de faire le buzz, d’être le premier à publier un scoop. Avec malgré tout l’objectif ultime de fidéliser les lecteurs…
[pullquote]Les journalistes aujourd’hui sont tour à tour capables d’enquêter sur le terrain, de rédiger, de prendre des photos, d’enregistrer des vidéos et de les monter… [/pullquote]La mort du journalisme d’investigation?
Quel rôle tient le journaliste dans ce flux incessant d’informations – oserais-je dire de contenu? Est-il tenu aux mêmes exigences de rédaction s’il veut être lu? En d’autres mots, est-il soumis aux diktats de référencement et d’indexation? Et surtout, comment peut-il assurer de livrer des articles de qualité, d’avoir le temps d’approfondir ses sujets et d’entreprendre à un véritable travail d’investigation?
Selon le reportage diffusé sur Arte fin août 2014 Presse: vers un monde sans papier?, les rédactions des grands groupes de presse proposent plusieurs solutions à ces questions. Le New York Time, avec plus de 700 000 abonnements payants à la version numérique, fait figure de modèle. Et c’est clairement la qualité et le professionnalisme de ses journalistes qui font toute la différence.
Véritables couteaux suisse, les reporters possèdent des compétences techniques et de jugement à toutes épreuves. Ils sont tour à tour capables d’enquêter sur le terrain, de rédiger, de prendre des photos, d’enregistrer des vidéos et de les monter… Ils peuvent s’appuyer sur la machine, comprennent les algorithmes imposés par Google, peuvent trier de l’information sur Twitter. Mais ils ont aussi des qualités humaines: avec beaucoup d’empathie, ils sont capables, de fournir une analyse de qualité grâce à leurs rencontres et leur expérience.
Un avenir incertain mais quelques espoirs
Paradoxalement, les contraintes d’immédiateté qui pèsent sur les médias ne signifient pas la mort du journalisme d’investigation, des enquêtes de terrain. C’est surtout le format quotidien qui devient obsolète mais la demande des citoyens pour de l’information de qualité ne faiblit pas, au contraire. Les formats magazines, papiers ou multimédias sont encore largement plébiscités. Les campagnes de crowfunding pour supporter les financements nécessaires à un journalisme de qualité en sont l’exemple le plus frappant. Preuve que le tout gratuit n’est pas l’apanage de l’actualité en ligne.
Difficile de prédire le journalisme de demain mais on imagine quelques pistes :
- Une information de plus en plus participative, basée sur les échanges des professionnels avec les lecteurs, via les réseaux sociaux notamment;
- Un contenu personnalisé, ciblé sur les centres d’intérêt de chacun et prédit grâce aux algorithmes des machines;
- L’essor de nouveaux longs formats, hybrides entre des reportages vidéos, des infographies et des articles rédigés.
Et vous? Etes-vous plutôt optimiste quant à l’avenir du journalisme? Comment l’envisagez-vous?
Commentaires
Bonsoir,
Merci pour ce point de vue, que je ne partage pas. Non, le journalisme d’investigation n’est pas mort bien au contraire, c’est l’avenir du quotidien tel que nous le concevons aujourd’hui. On reviendra du journalisme participatif comme on est revenu des Encyclopédistes de la nouvelle ère. Informer n’est pas qu’écrire mais la rédaction n’est qu’un aboutissement. La nécessité de s’adapter aux exigences modernes (et le référencement en est une) prime encore aujourd’hui sur les rédactions des plus grands titres de la presse internationale. Néanmoins, on sent aussi une résistance poindre et une nouvelle approche émerger.
Bonne soirée et merci encore pour votre analyse
Eric
Pour ma part, je dirai que ce n’est pas seulement le secteur du journalisme qui est touché par l’innovation du web, il s’agit d’un fait qui atteint tous les secteurs d’activité. De la santé à la formation, de la religion à la politique. Maintenant, l’enjeu pour tous les acteurs, c’est de suivre l’évolution, et de savoir l’apprivoiser de la bonne manière pour ne pas se laisser surpasser par les évènements.
Je suis d’accord avec vous Rédaction Web sauf que la presse touche autant les professionnels que le grand public. Il ne s’agit pas seulement de s’adapter à des exigences nouvelles dans la pratique d’un métier, il faut aussi comprendre l’évolution de tout un modèle de société. Vaste et passionnant sujet!
Morgane,ce n’est pas parce que le lecteur est volatiL qu’il faut le prendre pour un pigeon. Plus sérieusement, j’ai l’impression que la presse quotidienne paresse. Et ça se voit, puisqu’on peut grâce au web, comparer, constater, critiquer. Si le contenu est de qualité, le lecteur suivra et paiera le prix juste. Pour ma part, je compte suivre Médor, 24h01, Schnock…
Je ne sais pas si c’est de la paresse ou si les conditions de travail des journalistes, aussi passionnés soient-ils qui sont difficiles. Bien sûr Medor, Papier Machine et toutes les formes d’alternatives sont bonnes à prendre mais seul l’avenir nous dira si elles rencontreront réellement leur public…
Et sinon, merci pour le jeu de mot 😉